Page:Collectif - Le Livre rose vol 2.pdf/370

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son mur, un pauvre pistolet sans pierre, incapable de nuire à personne.

« Sombre et fidèle ami, s’écria le jeune homme, que renfermes-tu dans tes entrailles de fer ? quel secret mystérieux de doute et de terreur diras-tu à l’oreille de l’homme assez osé pour te poser sur sa tempe amaigrie ? quelle vérité terrible jaillira dans l’éclair de ta vieille batterie noircie par la fumée ?

— Hélas ! semblait répondre modestement le pauvre pistolet sans fiel, je n’ai plus de ressort, et toi-même tu n’as pas de poudre. Une détonation funeste, si tu me tournais contre toi, annoncerait l’instant de ma propre mort et non de la tienne ; les éclats que tu recevrais dans le nez et dans les yeux seraient les seules marques que je pourrais te laisser de mes longs et cruels services. »

N’est-ce pas quelque chose de hideux que l’influence d’un quantième ? Quand je pense que le premier du mois Garnier voltigeait sur les prairies émaillées, semblable à une bergeronnette des champs ! Les rosettes de ses escarpins étaient humides de rosée, de douces larmes erraient dans ses yeux. « Et qui donc lui donnait le bras ? — Que vous importe ? — Eh bien ! oui, c’était une lingère. » Ô solitude de Meudon ! Ô jouissance du pauvre ! celui qui ne vous connaît pas n’a jamais ni ri ni pleuré.

Garnier prit donc son violon et commença à se frot-