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REVUE POLITIQUE.



L’an 1881 finit.

Avant qu’il se soit écoulé sept jours, le monde civilisé changera le chiffre qui marque son âge et laissera choir complètement dans le passé les douze mois qui finissent.

Nous allons entrer en 82 avec des perspectives peu riantes. La vieille Europe, tourmentée par la diplomatie, semble préparer au monde quelques-unes de ces boucheries humaines cent fois plus effroyables que la plus effroyable catastrophe. Les grandes puissances, au lieu de résoudre leurs difficultés intestines, ajoutent à leurs soucis par d’ambitieux projets extérieurs. Elles se tiennent entre elles sur une continuelle défensive, fabriquant canons, mitrailleuses et cuirassés. Elles semblent poussées par un sûr pressentiment que l’heure de sanglantes conflagrations n’est pas éloignée. La paix n’est plus faite pour cette terre imprégnée du plus mauvais venin des erreurs modernes.

La Révolution poursuit sa marche triomphante vers le but qu’elle veut atteindre. Elle ne se sert plus des violents moyens d’autrefois ; depuis le commencement du siècle jusqu’à nos jours, elle a franchi un immense espace. Elle a bouleversé les lois et les systèmes de législation et elle a maintenant la légalité pour elle. La légalité, — c’est-à-dire la volonté du nombre, le droit du plus fort, — voilà désormais son arme ; et elle s’en sert avec un instinct satanique. Chaque coup porte avec précision à la base de l’édifice social et prépare le gigantesque effondrement de l’ordre moral et chrétien.

Chaque jour le câble nous apporte du vieux monde quelque triste nouvelle, constatant les progrès de plus en plus marquants, de plus en plus rapides de la révolution. Rien n’est respecté ; le Saint Vieillard du Vatican est poursuivi dans son dernier asile à Rome. Il sent plus fortement que jamais les entraves que la royauté d’Italie a mises autour du Vatican, et il est réduit à l’état de prisonnier véritable dans l’enceinte même de son palais.

Qu’on me permette de consacrer les premières lignes de ma dernière chronique de 1881, à cette triste nouvelle. C’est peut-être pour la dernière fois qu’à la fin d’une année, les regards chrétiens peuvent contempler le Pontife infaillible assis sur la chaire dix-huit fois séculaire des successeurs de