Page:Collectif - Revue de métaphysique et de morale, numéro 5, 1913.djvu/97

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A la seconde des grandes routes suivies par la Physique moderne, celle des théories moléculaires et cinétiques aboutissant aujourd’hui à l’interprétation du principe de Carnot par la mécanique statistique, se rattachent deux des cours professés par Henri Poincaré, la Thermodynamique et le Calcul des probabilités, calcul dont l’importance est devenue fondamentale pour nous. Son application à la physique soulève des questions extrêmement délicates, a non encore complètement résolues et auxquelles se rapportent certains des travaux les plus importants que nous aurons à rappeler.

On sait, d’autre part, que ces deux grandes voies électromagnétique et statistique sont venues, en se rejoignant dans la théorie du rayonnement noir, aboutir à des obstacles insurmontables jusqu’ici. Mis au courant de ces difficultés dans la réunion que nous eûmes à Bruxelles à la fin d’octobre 1911, Poincaré publiait aussitôt après, six mois avant sa mort, le dernier de ses Mémoires de physique mathématique, où il met en évidence avec une merveilleuse netteté le caractère aigu du conflit entre les théories et le fait. essentiel pour la physique à venir et pour les mathématiciens qui voudront l’outiller, que les phénomènes électromagnétiques dont les atomes sont le siège ne peuvent pas être représentés par des équations différentielles. Il Marquait ainsi, au moment de mourir lui-même, la fin de cette période de trois siècles pendant laquelle s’est constitué, dans l’espoir qu’il permettrait d’énoncer les lois du monde, l’admirable instrument du calcul infinitésimal. Nous savons aujourd’hui qu’il ne suffira pas à pénétrer le mystère des atomes, des lois élémentaires qui régissent cet univers nouveau dont la conquête sera le grand œuvre prochain. Pourquoi faut-il que nous ayons perdu, juste à ce moment critique, l’esprit le plus puissant sur lequel nous comptions pour nous aider et pour créer de toutes pièces, à mesure des besoins, les leviers nécessaires à soulever un monde ! J’essaierai tout à l’heure de donner rapidement une idée de la situation devant laquelle sa mort nous laisse.

A côté de ces deux questions dominantes, électromagnétisme et thermodynamique, toutes les autres parties de la physique mathématique furent exposées successivement sous une forme toujours nouvelle : capillarité, élasticité, théorie des tourbillons, propagation de la chaleur, théorie du potentiel newtonien. Les résultats nouveaux que chacun de ces enseignements ne pouvait manquer de faire éclore dans un cerveau d’une telle fécondité ont été, soit