Page:Collection de précis historiques et mélanges religieux, littéraires et scientifiques, année XII, 1863.djvu/297

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Un matelot venant à mourir d’une maladie contagieuse, son corps fut jeté à l’endroit où l’on avait enseveli la sainte. Or, il y avait, non loin de là, une tour qu’habitait un solitaire, occupé uniquement de Dieu et de son âme. L’infection qu’exhalait le cadavre du matelot était telle, que personne n’osait passer par la route voisine de l’endroit infecté. Le reclus lui-même fut contraint de s’avouer vaincu et de sortir de sa retraite pour aller enjoindre à quelques personnes de creuser une fosse, et d’y jeter le cadavre. On se mit promptement à l’œuvre ; mais à peine fut-on parvenu à une certaine profondeur, qu’on découvrit un autre corps qu’aucune corruption n’avait encore atteint. Frappés de la découverte, les gens suspendent d’abord le travail ; mais bientôt après, ignorant, sans doute, le prix du trésor qu’ils avaient entre les mains, ils ensevelirent dans ce même endroit le cadavre du matelot et s’empressent d’aller raconter dans tout le voisinage ce qui leur était arrivé. L’un de ces hommes, nommé Georges, connu pour sa grande piété envers Notre-Seigneur Jésus-Christ, se rendit à l’église pour y faire ses prières. C’était vers le soir. Pendant son sommeil, cet homme eut la vision suivante : il crut voir une reine assise sur un trône magnifique et entourée d’une multitude de guerriers rayonnants de lumière. À cet aspect, Georges est saisi d’une crainte involontaire ; et, ne pouvant supporter l’éclat éblouissant de cette garde nombreuse, il se prosterne par terre. Alors un des guerriers, le touchant de la main : — « Georges, lui dit-il, pourquoi avez-vous ainsi négligé le corps de sainte Parascève ? Exhumez-le promptement et donnez-lui une sépulture honorable ; car le roi du ciel est épris de sa beauté, et il veut la glorifier sur la terre. » — La sainte elle-même ajouta, à son tour, ces paroles : — « Oui, exhumez promptement mes dépouilles, et déposez-les dans un lieu convenable. J’appartiens à l’humanité comme vous, et la contrée qui m’avait vue naître est celle-là même que vous habitez maintenant[1]. » — La même nuit, une personne très pieuse, nommée Euphémie, eut une pareille vision, et, dès l’aube du jour, le fait était déjà divulgué.

À cette nouvelle, les habitants d’Epivati se portent en foule vers l’endroit indiqué ; on s’empresse d’exhumer le corps de la sainte, et on ne se lasse pas d’admirer le précieux trésor que Dieu leur a daigné révéler. Les dépouilles vénérées furent recueillies avec respect, et transportées solennellement dans l’église des Saints-Apôtres, où elles opérè-

  1. C’est-à-dire, Epivati.