Page:Collin - Trente poésies russes, 1894.djvu/40

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Enfin, de l’enfant blonde et douce que j’aimais
L’impitoyable sort me sépare à jamais.

Mon mal est sans espoir. Il faut que j’y succombe.
Creusez-moi dans ce pré, longue et large, une tombe.

Plantez-y, du côté du front, de verts buissons
D’aubépine, qu’Avril emplira de chansons,

Et, du côté des pieds, amenez, claire et pure,
L’eau des sources qui coule avec un frais murmure.

Et quand je dormirai, là, mon sommeil sans fin,
Chaque jour, aux clartés naissantes du matin,

Si, dans la profondeur de ma nuit solitaire,
Descendent jusqu’à moi les échos de la terre,

J’entendrai les éclats de rires enjôleurs
Des fillettes cueillant à pleines mains les fleurs

Ou la plainte des vieux qui, leur cruche remplie,
Près de l’eau, causeront avec mélancolie.