Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/145

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écrit, ce que je pouvais avoir à lui dire. Plusieurs fois, déjà, depuis trois mois, que je résidais chez lui, pareilles communications m’avaient été transmises ainsi. M. Fairlie se déclarait toujours « heureux de me posséder, » mais jamais il ne s’était trouvé assez bien portant pour me recevoir. À mesure que j’avais restauré, monté une série de dessins, le valet solennel les portait, avec mes « respects, » chez son maître, et revenait, les mains vides, chargé « des meilleurs compliments, des remercîments tout particuliers, des regrets sincères » de M. Fairlie, que sa condition valétudinaire obligeait de rester emprisonné dans la solitude de ses appartements. Il eût été difficile d’inventer un arrangement qui fût aussi agréable pour lui et pour moi. Je ne sais lequel des deux, en pareille circonstance, se sentait le plus obligé à cet ébranlement si commode du système nerveux de M. Fairlie.

Je m’assis immédiatement à mon bureau pour rédiger la lettre requise, que je tâchai de rendre aussi polie, aussi nette, aussi courte que possible. M. Fairlie ne se pressa point de répondre. Près d’une heure s’était écoulée, quand m’arriva un beau petit billet, tracé à l’encre violette sur un papier plus épais que le carton, plus lisse que l’ivoire, en caractères d’une netteté, d’une régularité parfaites. Il était conçu en ces termes :

« Compliments de M. Fairlie à M. Hartright. M. Fairlie est surpris et désappointé au delà de toute expression (dans l’état actuel de sa santé), par la communication que lui adresse M. Hartright. M. Fairlie est étranger aux affaires ; mais il a consulté son intendant, qui les connaît, et cet individu confirme M. Fairlie dans l’opinion déjà conçue qu’aucune nécessité quelconque (sauf, peut-être, un cas de vie ou de mort) ne saurait justifier la requête de M. Hartright, par laquelle il sollicite la rupture de son engagement. Si quelque chose pouvait ébranler ces sentiments de respectueux égards envers l’art et ses adeptes, qui sont la consolation et l’unique félicité de la misérable existence à laquelle M. Fairlie est condamné, le procédé actuel de M. Hartright aurait eu ce résultat. Il ne