Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/187

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yeux s’abaissèrent de nouveau vers le parquet, et la gêne dont témoignait sa physionomie sembla presque devenir une souffrance.

— Est-il donc absolument nécessaire qu’on me parle sans cesse de ces fiançailles ? demanda-t-elle d’une voix abattue.

— Il est nécessaire d’en toucher quelque chose, répondis-je, mais non d’y insister longuement. Disons tout bonnement que peut-être vous marierez-vous, peut-être non. Dans le premier cas, il faut que je sois par avance en mesure de rédiger votre contrat ; et je ne saurais le faire, la politesse le veut ainsi, sans vous consulter d’abord. Ma chance actuelle est peut-être la seule que j’aie jamais de savoir par vous-même ce que vous désirez. Supposons donc, — pure hypothèse, — que le mariage aura lieu, et permettez-moi de vous renseigner, en aussi peu de mots que possible, sur votre position actuelle, et sur les conditions que vous pouvez faire à votre avenir, si telle est votre volonté…

Je lui expliquai alors l’objet et la portée d’un contrat de mariage ; je lui dis ensuite, très-exactement, ce qu’elle avait à attendre, — d’abord à sa majorité, plus tard à la mort de son oncle, — en lui signalant la différence à faire entre les propriétés qu’elle posséderait simplement à titre viager, et celles dont elle aurait la pleine et libre disposition. Elle m’écoutait attentivement, du même air contraint, et les mains toujours unies sur ses genoux par une étreinte nerveuse.

— Maintenant, lui dis-je pour conclure, veuillez me dire si vous avez en vue quelque clause que vous souhaiteriez introduire dans l’acte, le cas prévu venant à se réaliser, — clause sujette, tout naturellement, à l’approbation de votre tuteur, puisque vous n’êtes pas majeure encore…

Elle s’agitait dans son fauteuil, où elle semblait mal à l’aise. Tout à coup, elle me regarda bien en face et d’un air très-sérieux.

— S’il en est ainsi, commença-t-elle d’une voix faible, si je dois…