Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/421

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’à trois pieds tout au plus de l’appui des croisées, — une rangée de caisses à fleurs était disposée, d’assez larges intervalles existant de l’une à l’autre ; et pour les empêcher de tomber en cas d’ouragans, une petite barrière de fer ouvragé bordait le toit sur toute sa longueur.

Le plan qui venait de s’offrir à moi consistait à me laisser glisser par la fenêtre de mon boudoir sur le toit de la verandah ; je projetai de m’y traîner sans bruit jusqu’à la portion qui dominait exactement la fenêtre de la bibliothèque, et de me tapir là, parmi les caisses de fleurs, l’oreille collée à la balustrade extérieure. Dans le cas où sir Percival et le comte seraient installés pour fumer, comme je les avais déjà vus bien des fois, le soir, leurs fauteuils sur le seuil même de la fenêtre ouverte, et leurs pieds étendus sur les sièges de zinc qui garnissaient la verandah, — toute parole échangée entre eux, qui ne serait pas prononcée absolument à voix basse (et, nous le savons tous par expérience, aucune conversation un peu longue ne peut se maintenir à ce diapason) devait inévitablement arriver à mes oreilles. Si, d’autre part, ils préféraient, ce soir-là, rester à l’intérieur de la pièce, j’avais alors toute chance ou de ne rien entendre, ou d’entendre très-peu de chose ; et, dans ce cas, il me faudrait courir le risque beaucoup plus sérieux, de descendre l’escalier pour venir m’embusquer auprès d’eux.

Bien que la nature désespérée de notre situation me fît résolument envisager les partis les plus extrêmes, j’espérais avec ardeur pouvoir me soustraire à cette seconde alternative. Mon courage, après tout, n’était que le courage d’une femme ; et il était bien près de me manquer, à l’idée de m’aller mettre, par cette nuit noire, en descendant au rez-de-chaussée, sous la main même de sir Percival et du comte.

Je rentrai à petit bruit dans ma chambre à coucher, pour tenter d’abord l’épreuve moins périlleuse du toit de la verandah.

Un complet changement de costume était impérieusement requis, pour bien des raisons. J’ôtai, pour com-