Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/431

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verandah sur l’allée sablée qui en longeait l’extérieur. Je reconnus, à sa voix, ce changement de place : — La pluie est enfin arrivée, lui entendis-je dire. Et, en effet, elle « était » arrivée. L’état de mon manteau eût attesté, au besoin, qu’elle tombait assez dru depuis quelque temps déjà.

Le comte revint sous la verandah. J’entendis, au moment où il s’asseyait, son fauteuil craquer sous lui.

— Eh bien, Percival, disait-il, dans le cas où lady Glyde viendrait à décéder, qu’auriez-vous à prétendre ?

— Si elle ne laisse pas d’enfants…

— Ce qui est improbable…

— Ce qui est très-probable, au contraire, ce qui est presque certain…

— Bah ! vraiment ?…

— Et bien, alors, j’ai droit à ses vingt mille livres.

— Payées comptant ?

— Payées comptant…

Il se turent encore. Au moment où leur dialogue s’arrêtait, l’ombre de madame Fosco vint de nouveau, sur le store, inscrire sa noire silhouette. Cette fois, au lieu de ne faire que passer, elle demeura un instant tout à fait immobile. Je vis ses doigts se glisser à l’angle du store, et le soulever d’un côté. Le galbe de sa face blanche apparut derrière les vitres, tourné justement du côté où j’étais. Enveloppée de la tête aux pieds dans ma pelisse noire, je me gardais bien de remuer. La pluie, qui rapidement me pénétrait, inondait aussi les carreaux, les ternissait, et l’empêchait de rien discerner : — Toujours de la pluie !… l’entendis-je s’écrier. Puis elle laissa retomber le store… et je recommençai à respirer librement.

La causerie continuait au-dessous de moi ; cette fois le comte l’avait reprise :

— Percival ! avez-vous grand souci de votre femme ?

— Fosco !… voilà une question quelque peu naïve.

— Je suis un homme naïf, moi, et je répète ma question.

— Pourquoi diable me regardez-vous ainsi ?