que peut engendrer la vertu la plus exaltée… pourvu que l’occasion me fût donnée de pouvoir la déployer. Le malheur de ma vie, c’est que j’ai eu pour cela, jusqu’ici, trop peu de chances. Ma conception de l’amitié va jusqu’au sublime. Est-ce donc ma faute si votre squelette s’est révélé à moi ? et pourquoi vous avouai-je tout à l’heure ma curiosité ? Oh ! Anglais superficiel que vous êtes, c’est pour grandir l’empire que j’ai sur moi-même. Je pourrais, si cela me convenait, extraire de vous ce secret si bien gardé, comme je fais sortir ce doigt de ma main qui le serre… Je le pourrais, et vous le savez !… Mais vous avez fait appel à mon amitié ; or les devoirs de l’amitié sont sacrés pour moi. Voyez plutôt !… je foule aux pieds ma curiosité qui me ravale à mes propres yeux… L’exaltation de mes sentiments m’élève au-dessus d’elle. Sachez les reconnaître, Percival ! Percival, sachez les imiter !… Et, tenez !… une poignée de main… Je vous pardonne !…
Sur ces derniers mots la voix sembla lui manquer, lui manquer comme si, dans ce moment-là même, il était suffoqué par les larmes !
Sir Percival, un peu confus, essayait de s’excuser, mais le comte était trop magnanime pour prêter l’oreille à ses commentaires.
— Non ! disait-il, quand mon ami m’a blessé, je lui pardonne sans avoir besoin de ses apologies. Dites-moi, tout simplement, si vous avez besoin de mon secours ?
— Mais, oui… il m’est terriblement nécessaire.
— Et pouvez-vous me le demander sans vous compromettre ?
— Je puis essayer, du moins.
— Essayez donc !
— Eh bien ! voici comme vont les choses… Je vous ai dit aujourd’hui, que j’avais fait tout mon possible pour découvrir Anne Catherick ; je vous ai dit que j’avais échoué.
— Oui ; tout cela, vous me l’avez dit.
— Fosco !… Je suis perdu si je ne la retrouve pas.