Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/451

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pleurs. Il est de la même classe qu’elle, et doit s’y connaître mieux que moi. Convenons que c’étaient des pleurs.

À moins que les procédés raffinés de l’art ne leur ôtent toute ressemblance avec la nature, j’ai contre les pleurs des objections formelles. Au point de vue de la science, ils constituent, purement et simplement, ce qu’on appelle une sécrétion. Or, si je puis comprendre qu’une sécrétion soit bonne ou mauvaise pour la santé, il m’est impossible de deviner l’intérêt qu’elle peut avoir dans l’ordre sentimental ou passionnel. Mes préventions à ce sujet tiennent peut-être à ce que mes sécrétions, à moi, se font assez mal. Mais peu importe. Je me conduisis en cette occasion avec tous les égards, toute la sensibilité imaginables. Je fermai les yeux, et je dis à Louis :

— Tâchez de savoir au juste ce qu’elle veut dire !…

Louis tâcha de comprendre ; la jeune fille tâcha de s’expliquer. Ils ne réussirent qu’à s’embrouiller l’un et l’autre de telle façon que, — la reconnaissance m’oblige à cet aveu, — ils me procurèrent un véritable amusement. Je les enverrai chercher, j’imagine, quand je me sentirai disposé à la tristesse.

Je viens de communiquer à Louis cette bonne idée. Chose singulière, elle semblait l’avoir un peu décontenancé !… Le pauvre garçon !

On ne s’attend pas, très-certainement, à ce que je reproduise, dans l’anglais même de mon valet suisse, l’explication que donnait de ses pleurs la femme de chambre de ma nièce. Voilà qui serait manifestement impossible. Mais je parviendrai, peut-être, à faire connaître mes impressions et mes sentiments. Cela ne doit-il pas suffire ? Pour l’amour de Dieu, qu’on réponde affirmativement là-dessus !

Cette fille, je crois, commença par me dire (Louis était son truchement) qu’elle avait quitté, sur l’ordre de son maître, le service de sa maîtresse. (Remarquez, en passant, l’étrange inconséquence de la jeune personne. Était-ce ma faute, à moi, si elle avait perdu sa place ?) Après son renvoi, elle était allée coucher à l’auberge. (Je ne tiens