Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/618

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chaîne, — objets qu’une dame du monde devrait seule posséder, et dont sa femme ne veut pas lui faire connaître la provenance. — Les aurait-elle volés ? m’écriai-je. — Non, dit-il ; un vol, ce serait déjà bien mal. Mais c’est encore pire que cela ; elle n’aurait pas eu, par ici, la chance de dérober des objets pareils ; et quand bien même cette chance lui eût été offerte, elle n’était pas femme à en profiter. Ce sont des cadeaux, Lizzie… ses initiales sont gravées à l’intérieur de la montre ; … et Catherick l’a vue causer secrètement, et se conduire comme ne doit pas le faire une femme mariée, avec ce gentleman en deuil, sir Percival Glyde. N’en dites rien à personne… Pour cette nuit, j’ai apaisé Catherick. Je lui ai conseillé de retenir sa langue, d’ouvrir les yeux et les oreilles, et d’attendre un ou deux jours pour avoir une certitude complète : — Je crois, dis-je à mon mari, que tous les deux vous avez tort. Il n’est pas naturel que, bien à son aise et respectée comme elle l’est ici, mistress Catherick ait la tête tournée par un étranger de passage, tel que ce sir Percival Glyde. — Oui ; mais est-il un étranger pour elle ? me répondit-il. Vous oubliez comment la femme de Catherick en est venue à l’épouser. C’est après lui avoir dit non mainte et mainte fois, quand il la sollicitait, que, d’elle-même, tout à coup, elle a démenti son refus. Ce n’est pas d’aujourd’hui, Lizzie, qu’on a vu de mauvaises femmes employer à sauver leur réputation, et à couvrir une faute, l’aveuglement d’un honnête homme qui les aime ; et je crains bien que cette mistress Catherick ne soit aussi vicieuse que la pire d’entre elles. Nous verrons, du reste, continua mon mari, et je crois que ce ne sera pas long. Deux jours après, en effet, nous avions vu…

Mistress Clements suspendit un moment son récit. Dès ce moment-là même, je commençai à douter que j’eusse réellement trouvé, après tout, le fil conducteur qui devait me guider vers le mystère caché au centre du labyrinthe. Cette chronique vulgaire, malheureusement trop vulgaire, d’un homme perfide et d’une femme fragile, pouvait-elle me fournir la clef d’un secret qui pesait, terreur permanente, sur toute l’existence de sir Percival Glyde ?