Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/716

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Les nouvelles qui m’étaient ainsi annoncées, — nouvelles que je rattachai immédiatement à quelque tentative de trahison de la part du comte Fosco, — me bouleversèrent complètement. Le papier froissé dans ma main, je demeurais sur place, presque hors d’haleine. Qu’était-il donc arrivé ? quelle subtile méchanceté le comte avait-il combinée, exécutée en mon absence ? Une nuit s’était écoulée depuis que le billet de Marian avait été tracé ; — plusieurs heures devaient s’écouler encore avant que je pusse me retrouver auprès d’elle ; — quelque nouveau désastre avait déjà pu se produire, dans l’ignorance duquel je restais plongé. Pourtant, il fallait demeurer ici, séparé par bien des lieues de ces chères créatures, — retenu, doublement retenu par les exigences de la légalité !

Je ne saurais dire à quel point mes anxiétés et mes alarmes auraient pu m’entraîner en dépit des obligations qui pesaient sur moi, sans la calmante influence de la foi que j’avais en Marian. Si je n’avais absolument compté sur elle, aucune autre considération humaine n’aurait pu m’aider à me contenir et me donner le pénible courage de l’attente. Le premier obstacle qui gênât ma liberté d’action était l’enquête à laquelle il me fallait assister pour la seconde fois. Je me rendis à l’heure fixée, les formalités légales exigeant ma présence dans cette enceinte ; mais, vu la tournure que prirent les choses, je ne fus point obligé à revenir sur mon témoignage. Ce retard inutile était une rude épreuve ; je calmai pourtant de mon mieux l’impatience qui me dévorait, en étudiant, avec toute l’attention qu’il me fut possible de concentrer, la marche de la procédure.

Arrivé de Londres le matin même, le « solicitor » du défunt (M. Merriman) se trouvait parmi les personnes présentes ; mais il ne put apporter à l’enquête aucun supplément de lumière, et dut se borner à reconnaître ce fait, après avoir exprimé son étonnement, sa douleur. À diverses reprises, pendant les nouveaux interrogatoires, il suggéra des questions, immédiatement posées par le « coroner, » mais qui n’aboutirent à aucun résultat.