Page:Collins - La Femme en blanc.djvu/787

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la vivacité : dignes des jardins d’Éden, ils le sont aussi du jardin de Regent’s-Park. Hommage à la zoologie britannique, offert par Fosco… »

La plume grinça et cracha de nouveau ; le splendide paraphe couronnait la signature du donateur.

— Et les souris, comte ? dit madame Fosco. Les souris n’y sont pas comprises…

Il quitta le bureau, saisit la main de sa femme, et la plaça sur son cœur :

— Éléonor, dit-il avec solennité, toute résolution humaine à ses limites. Dans ce document, j’ai atteint celles de mon courage. Je ne saurais me séparer de mes souris blanches. Excusez ma faiblesse, cher ange, et allez les arranger là-haut, dans leur cabine de voyage.

— Bonté admirable ! dit madame Fosco, s’extasiant devant son mari, et me jetant un dernier regard de vipère. Elle emporta la cage hors de la chambre, avec les plus grandes précautions.

Le comte regarda sa montre. Nonobstant le calme qu’il affectait résolument, il lui tardait de voir arriver son employé. On avait, depuis longtemps, éteint les flambeaux, et les rayons de la matinée nouvelle venaient inonder l’appartement. Seulement à sept heures cinq minutes, on entendit sonner la cloche d’appel, et l’agent parut devant nous. C’était un étranger, porteur d’une belle barbe noire.

— Monsieur Hartright ! monsieur Rubelle ! dit le comte nous présentant l’un à l’autre. Il emmena l’agent (un espion étranger si jamais il y en eut, sa figure le disait assez), dans un coin de la chambre où il l’entretint à voix basse ; après quoi il nous laissa tête à tête. M. Rubelle, aussitôt que nous fûmes seuls, me suggéra, le plus poliment du monde, qu’il était à mes ordres, et qu’il serait flatté de recevoir mes instructions. J’écrivis pour Pesca deux lignes qui l’autorisaient à remettre au « porteur » mon enveloppe cachetée ; sur cette note je plaçai l’adresse, et la délivrai à M. Rubelle.

L’agent attendit avec moi que son patron fût de retour en costume de voyage. Avant de faire partir son émis-