blème. Jusqu’alors je soupçonnais seulement que la Pierre de Lune avait été volée et qu’un des domestiques pouvait être l’auteur de ce vol. Fort bien ! mais arrivés à ce point, que se produit-il ? Miss Verinder sort à l’improviste de sa chambre et m’adresse la parole ; je remarque alors trois choses d’apparence suspecte contre cette jeune personne. Sa violente agitation, bien que vingt-quatre heures se soient écoulées depuis la disparition du diamant. Elle me traite comme elle avait traité déjà l’inspecteur Seegrave, et se montre mortellement irritée contre M. Franklin Blake. Je fais mentalement la réflexion suivante : Voici une jeune dame qui perd un joyau de grand prix, dont le caractère, ainsi que j’en puis juger moi-même, est impétueux et violent. Avec sa nature, et dans cette circonstance, que fait-elle ? elle manifeste la plus forte aversion contre M. Blake, contre l’inspecteur et contre moi, autrement dit contre les trois personnes qui toutes font de leur mieux pour lui faire retrouver son diamant ! Mon enquête arrivée là, ce n’est qu’alors, milady, que les leçons de mon expérience me reviennent ; car elle seule peut m’aider à comprendre l’inexplicable attitude de miss Rachel, et je la rapproche de celle de diverses autres jeunes dames auxquelles j’ai eu affaire. J’en conclus qu’elle a des dettes qu’elle n’ose avouer, et qu’il faut payer ; il s’ensuit que je me demande si la perte du diamant ne signifierait pas qu’il est secrètement mis en gage comme moyen de les acquitter. Qu’oppose milady à ces conclusions qui me sont suggérées par les souvenirs de ma carrière et d’une longue expérience ?
— Je répète ce que j’ai déjà dit, répondit ma maîtresse ; toutes ces circonstances vous ont bien naturellement induit en erreur. ».
Je ne disais rien de mon côté ; je ne sais par quel bizarre association d’idées Robinson Crusoé m’était revenu à l’esprit ; si le sergent Cuff avait pu en ce moment se trouver transporté dans une île déserte, et sans avoir même un Vendredi pour lui tenir compagnie, ni surtout un vaisseau pour le ramener, il se serait trouvé dans l’exacte situation où je souhaitais de le voir alors ! Remarquez que je suis pourtant un parfait chrétien, lorsque vous ne me demandez pas de pousser la pratique de mes vertus par trop loin ! mais ce