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— J’éteignis ma bougie, afin qu’elle pût croire que j’étais couchée. Je n’étais guère raisonnable, moi non plus, car je tenais absolument à conserver mon diamant auprès de moi et dans le meuble que j’avais choisi.

— Après avoir soufflé votre lumière, êtes-vous allée vous coucher ?

— Je n’en eus pas le temps ; au moment où je l’éteignis, la porte du petit salon s’ouvrit, et je vis entrer…

— Vous vîtes entrer… ?

Vous.

— Étais-je habillé comme de coutume ?

— Non.

— Vêtu d’une robe de chambre ?

— En effet, et tenant le bougeoir de votre chambre à la main.

— J’étais seul ?

— Tout seul.

— Pouviez-vous voir ma figure ?

— Oui, parfaitement, votre bougie l’éclairait en plein.

— Mes yeux étaient-ils bien ouverts ?

— Oui.

— Vous n’y remarquâtes rien d’étrange ? Leur expression n’était pas fixe, ou absente ?

— Je n’y vis rien de ce genre. Votre regard était animé, et même plus brillant que de coutume. Vous promeniez vos yeux autour de la pièce, comme un homme qui sait qu’il se trouve dans un lieu où il ne devrait pas être et qui a peur d’être découvert.

— Avez-vous observé autre chose lors de mon entrée ? quelle était ma démarche ?

— La même que celle que vous avez toujours. Vous vous êtes avancé jusqu’au milieu du salon, puis vous vous êtes arrêté en regardant autour de vous.

— Que fîtes-vous, quand vous m’aperçûtes ?

— Je ne pus ni bouger ni parler ; j’étais pétrifiée ; il me fût impossible d’appeler et même de fermer ma porte.

— Dans la position que vous occupiez, pouvais-je vous voir ?

— Vous l’eussiez pu, bien certainement, mais vous ne regardâtes pas de mon côté ; cette question est inutile, je suis sûre que vous ne m’avez pas vue.