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Page:Collins - La Pierre de lune, 1898, tome 2.djvu/148

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évite la peine avant la fin du terme que nous nous fixons là. »

M. Bruff se contenta de sourire et prit son chapeau.

« Dites au sergent, reprit-il, que, selon moi, la découverte de la vérité dépend de la découverte de la personne qui a mis le diamant en gage, et faites-moi savoir ce qu’avec son expérience le sergent pense de mon idée. »

Là-dessus nous nous séparâmes.

Dès le lendemain, je partis pour la petite ville de Dorking, que Betteredge m’avait désignée comme le lieu de la retraite du sergent Cuff.

J’appris à l’hôtel où se trouvait le cottage du sergent. On y arrivait par un chemin détourné un peu en dehors de la ville ; la petite maison était située au milieu d’un jardin protégé par un bon mur de brique en arrière et de côté, avec une haie épaisse servant de clôture pour la partie du devant. La porte, formée d’un élégant treillage peint en vert, était fermée ; après avoir sonné, je jetai un coup d’œil à travers les interstices, et je vis la fleur favorite du célèbre Cuff répandue partout à profusion ; elle fleurissait dans le jardin, courait le long des fenêtres et garnissait la porte. Maintenant qu’il n’avait plus à rechercher les crimes et les mystères de la grande ville, le fameux employé de la sûreté jouissait en paix, enseveli comme le sybarite sous les roses, des dernières années de sa vie !

Une femme d’âge canonique, à l’air respectable, m’ouvrit la porte et détruisit aussitôt toutes les espérances que je fondais sur l’aide du sergent. Il était parti la veille pour l’Irlande !

« Y est-il allé pour affaires ? » demandai-je.

La femme sourit :

« Il n’en a plus qu’une en tête, monsieur, et c’est celle des roses. Le jardinier d’une grande maison en Irlande vient de découvrir quelque nouveauté à ce sujet, et M. Cuff fait ce voyage pour s’en enquérir.

— Savez-vous quand il doit être de retour ?

— C’est fort incertain, monsieur. M. Cuff m’a dit qu’il pouvait revenir immédiatement, ou bien rester absent assez longtemps, selon qu’il trouverait la nouvelle découverte digne d’intérêt ou non. Si vous avez quelque message pour lui, je m’empresserai de le lui faire tenir. »