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paraître l’homme qui avait suivi M. Luker à sa sortie de la banque.

Son rapport n’offrait aucun intérêt ; M. Luker était rentré chez lui après avoir congédié ses gardiens, et on ne l’avait plus vu ressortir. Vers la tombée de la nuit, les volets avaient été fermés et la porte soigneusement verrouillée. La surveillance de la maison et de ses environs n’avait laissé apercevoir aucune trace des Indiens ; personne ne s’était même approché des alentours. Les faits portés à notre connaissance, l’homme attendit pour savoir si nous n’avions pas d’autres ordres à lui donner. M. Bruff le renvoya pour cette nuit.

« Pensez-vous que M. Luker ait emporté la Pierre de Lune chez lui ? demandai-je.

— Non pas, répondit M. Bruff ; il n’eût jamais congédié ses deux policemen, s’il s’était risqué à garder le diamant dans sa propre maison. »

Nous attendîmes le jeune garçon pendant une demi-heure, et en vain. Il était temps alors pour M. Bruff de rentrer à Hampstead, et pour moi d’aller retrouver Rachel à Portland-Place. Je laissai une de mes cartes au portier de l’étude, avec une ligne écrite dessus, indiquant que je serais chez moi ce soir à dix heures et demie ; la carte devait être remise au gamin, s’il revenait à l’étude.

Quelques personnes ont le talent d’être exactes, et d’autres ont la fâcheuse spécialité de manquer à leurs engagements. Je suis de ces dernières ; ajoutez-y que je passai la soirée à Portland-Place, assis tout près de Rachel dans un salon de quarante pieds de long, avec Mrs Merridew établie à l’autre extrémité. Quelqu’un s’étonnera-t-il, après cela, que je sois rentré à minuit et demi au lieu de dix heures et demie ? Ce quelqu’un, alors, n’aurait jamais eu de cœur, et je souhaite de ne jamais faire sa connaissance.

Mon domestique me tendit un papier, au moment où il m’ouvrit la porte. J’y lus ces mots tracés d’une main d’expéditionnaire :

« Je vous prie de m’excuser, monsieur : je sens le sommeil qui me prend ; je reviendrai demain matin entre neuf et dix heures. »

Grâce à mes questions, j’appris qu’un garçon ayant des yeux