Page:Collins - La Pierre de lune, 1898, tome 2.djvu/261

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sin ne pouvait donc réellement songer à se marier dans une semblable position. Vous n’ignorez pas qu’il tenta la chance auprès d’une autre héritière et que la question d’argent fit encore manquer son mariage. Vous avez su également le legs de cinq mille livres que lui fit, peu après, une des nombreuses créatures du sexe faible dont cet homme séduisant avait su s’attirer l’admiration et les bonnes grâces. Les événements nous ont prouvé que ce legs causa sa mort tragique.

J’ai su que, lorsqu’il hérita des cinq mille livres, il se rendit à Amsterdam. Là il conclut tous les arrangements, pour la taille de la Pierre de Lune. Il revint déguisé, et, sous ce costume, alla dès le lendemain dégager le diamant. Les deux associés convinrent, par prudence, de laisser passer quelques jours avant de retirer le joyau de la banque. S’il avait pu ensuite se rendre avec son butin à Amsterdam, il lui restait le temps nécessaire pour faire tailler le diamant et en disposer avant le mois de février 1850, époque de la majorité de son pupille. Vous jugerez, par là, des motifs puissants qu’il avait pour courir de pareils risques ! Si jamais homme dut jouer son va-tout, c’était bien lui.

Je veux vous rappeler, avant de finir mon rapport, qu’il reste encore une chance de mettre la main sur les Indiens, et par conséquent de rentrer en possession du diamant. Nous avons tout lieu de croire que ces conjurés sont actuellement à bord d’un vaisseau de la Compagnie des Indes, frété pour Bombay. Ce bâtiment, sauf accident, ne doit toucher dans aucun port sur sa route ; et les autorités de Bombay, déjà prévenues par des dépêches, se tiennent prêtes à visiter le navire dès sa première apparition dans leur port.

J’ai l’honneur, cher monsieur, de me dire votre très-obéissant serviteur,

Richard Cuff,
Ancien sergent de la police active,
Scotland Yard, Londres.