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ment parce qu’au milieu de sa frayeur, mon nom fut la premier qui lui vint à la pensée.

« Une sueur froide m’inondait, monsieur, ajouta ce pauvre misérable ; je ne savais plus ce que je disais, et j’espère, monsieur Bruff, que vous me pardonnerez en considérant que j’avais absolument perdu l’esprit. »

J’acceptai ses excuses avec assez de facilité. D’abord, c’était le moyen le plus prompt de me délivrer de sa présence, mais avant qu’il me quittât, je lui demandai si, au moment de se retirer, l’Indien n’avait pas fait quelque question digne de remarque.

Oui ! l’Indien avait en partant fait exactement la même question à M. Luker qu’à moi, et en avait reçu naturellement la même réponse que celle que je lui fis.

Que signifiait tout cela ? M. Luker ne put m’aider à déchiffrer cette énigme et je n’y réussis pas davantage par mes propres efforts. J’avais pour le soir une invitation à dîner en ville. L’esprit assez mal disposé, je remontai afin de procéder à ma toilette. Qui m’eût dit que ce dîner allait me fournir l’occasion de découvrir ce qui m’intriguait tant ?


CHAPITRE III


À ce repas, le personnage important se trouva être M. Murthwaite.

Lorsqu’il revint en Angleterre à la suite de ses lointaines pérégrinations, toute la société s’intéressa à ce voyageur. On voulut recueillir de sa bouche le récit des nombreux dangers auxquels il avait échappé. Il annonçait l’intention de retourner sur le théâtre de ses exploits et de pénétrer dans des régions encore inexplorées. Ce magnifique mépris de la mort qui lui faisait exposer une seconde fois sa vie réchauffait l’enthousiasme de ses admirateurs, car assurément toutes les probabilités humaines étaient contre lui. Nous n’avons pas tous les jours la chance de nous rencon-