Page:Collins - La Pierre de lune, 1898, tome 2.djvu/66

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ceci : les Indiens d’aujourd’hui ne sont évidemment, vu leur âge, que les successeurs des trois autres Indiens qui suivirent le colonel jusqu’à nos rivages ; observez, monsieur Bruff, que tous trois étaient des Brahmines de haute caste lorsqu’ils quittèrent leur pays ! Nos Indiens actuels ont donc remplacé ceux qui les avaient précédés en Angleterre. S’ils n’avaient fait que cela, peu importerait ; mais ils ont fait bien plus ! ils ont succédé à l’organisation établie par leurs devanciers ; ne tressaillez donc pas ainsi ! Cette organisation paraît presque dérisoire, je le sais, pour nos idées anglaises ; moi, je la considère comme une association pouvant lever de l’argent sur ses affiliés et requérir au besoin les services de cette classe d’Anglais interlopes qui frayent à Londres avec une certaine espèce d’étrangers. Enfin les associés ont pour eux les sympathies cachées d’un petit nombre de leurs compatriotes et coreligionnaires employés dans quelques-unes des industries de cette grande ville. Tout cela, vous le voyez, ne paraît pas bien redoutable, et pourtant cette modeste petite organisation indienne est digne d’attention, parce que nous pourrons être forcés de compter avec elle. Le terrain ainsi déblayé, je vais vous poser une question, à laquelle je suis sûr que votre expérience va répondre. Quel est l’événement qui ouvrit aux Indiens leur première chance de ressaisir le diamant ? »

Je compris l’allusion faite à mon expérience.

« Leur première chance se présenta clairement, dis-je, à la mort du colonel. Ils furent instruits de son décès, à ce que je suppose ?

— Tout naturellement, et comme vous le dites, cet événement décida de leur première chance. Jusque-là, le diamant était en sûreté dans la caisse d’une banque. Vous dressâtes le testament par lequel le colonel laissait la Pierre de Lune à sa nièce ; le testament fut légalisé dans les formes habituelles. Vous, homme de loi, vous n’êtes pas en peine de savoir la voie que devaient dès lors suivre les Indiens, après s’être pourvus d’un conseil compétent et anglais ?

— Ils ont dû se procurer une copie de cet acte aux Doctor’s-Commons, répliquai je.

— Justement. Un de ces Anglais interlopes dont j’ai déjà parlé la leur aura fournie. La copie du testament leur ap-