Page:Collins - Le Secret.djvu/182

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Quand l’oncle Joseph revint, il rapporta à sa nièce la bonne nouvelle que dans une heure une diligence devait passer par Truro, laquelle les déposerait à une station d’où ils n’auraient que cinq à six milles à faire pour se rendre au bureau de la poste de Porthgenna. Le seul moyen d’y arriver directement eût été d’attendre une diligence de nuit, chargée du service des dépêches, laquelle traversait Truro à deux heures du matin, heure des plus incommodes. Étant d’avis que voyager à l’heure où l’on dort est transformer un plaisir en fatigue, l’oncle Joseph proposa de prendre la diligence de jour, sauf à louer ensuite n’importe quel moyen de transport, pour sa nièce et lui, jusqu’au bureau de poste. Par cet arrangement, outre qu’ils s’assuraient un voyage plus commode, ils perdraient le moins de temps possible à Truro, avant de se mettre en route vers Porthgenna.

Ce plan fut adopté. Lorsque la diligence fit halte pour changer de chevaux, l’oncle Joseph et sa nièce se trouvaient déjà au relais pour prendre leurs places. L’intérieur était vide, à une exception près. En deux heures ils furent transportés à la station la plus voisine de l’endroit où ils se rendaient. Là, ils louèrent une chaise de poste, et arrivèrent entre une et deux heures de l’après-midi à la poste de Porthgenna.

Renvoyant leur voiture dès qu’ils furent arrivés à l’auberge, par un surcroît de précautions qu’avait suggéré Sarah, ils se mirent en route, à travers la lande marécageuse, pour se rendre au vieux manoir. Au sortir de la ville, ils rencontrèrent le facteur, qui rentrait de sa tournée du matin dans les districts environnants. Ce jour-là, son sac avait été bien plus lourd, et sa promenade bien plus longue qu’à l’ordinaire. Parmi les lettres extra qui lui avaient valu cet excédant de besogne, il en était une adressée à la femme de charge de Porthgenna-Tower, qu’il avait remise de fort bonne heure, en commençant sa ronde.

Pendant toute la durée du voyage, l’oncle Joseph n’avait pas fait une seule allusion à l’objet en vue duquel ce voyage s’accomplissait. Avec la simplicité de l’enfant, il avait aussi de l’enfant la souple et facile disposition. Les anxiétés et les prévisions sinistres qui troublaient l’esprit de sa nièce, et l’attristaient, et la rendaient muette, ne jetaient aucune ombre sur la sérénité radieuse du bon vieillard. N’eût-il, en réalité, voyagé que pour son agrément, il n’aurait pas joui plus complètement des petits incidents et des spectacles variés que