Page:Columelle - L'Économie rurale, Tome 1, trad Du Bois, 1844.djvu/407

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volontiers qu’on pût agir ainsi à l’égard de toutes les espèces d’arbres dont le liber a plus de consistance et de cambium que la vigne ; pour la vigne, ma bonne foi ne me permet pas de dissimuler qu’il y aurait une témérité excessive à permettre pendant tant de mois cette greffe aux agriculteurs : je n’ignore pas pourtant que quelquefois une greffe opérée au solstice d’hiver a réussi ; mais il ne faut pas se fier au résultat naturellement hasardeux d’une ou de deux expériences, et il ne faut conseiller à ceux qui s’instruisent que ce qui, après de nombreuses observations, a été reconnu arriver le plus souvent. Pourtant, jusqu’à un certain point, je ne m’opposerais pas à cet essai, si on n’en courait les risques que sur un petit nombre de sujets, parce qu’alors on pourrait remédier à cette témérité par un redoublement de soins ; mais du moment où l’immensité du travail absorberait tous les instants du cultivateur le plus diligent, je dois tout faire pour le détourner de cette pratique.

Ce que prescrit Atticus est donc contraire à tous les principes ; en effet, lui-même nie qu’on puisse avantageusement tailler la vigne au solstice d’hiver. Cette opération, qui pourtant la blesse moins, doit être à bon droit interdite, parce que toute jeune plante souffre et s’engourdit par l’effet du froid, et que les frimas s’opposent aux efforts que fait l’écorce pour recouvrir et guérir la plaie. Et ce même Atticus ne défend pas de greffer à cette époque, quoique, d’après ses prescriptions mêmes, il faille, pour, le faire, couper en totalité la tête de la vigne, et fendre le cep à l’endroit de l’amputation.

Il est plus rationnel de greffer lorsque, après l’hiver, le temps s’est attiédi ; que naturellement l’écorce et les bourgeons entrent en mouvement, et qu’il n’y a plus à redouter de froids assez violents pour brûler ou la greffe insérée, ou la plaie qui résulte de la fente. Je permettrais cependant aux cultivateurs qui craignent de s’attarder,