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Lecture de l’Omoplate



PARMI les nombreuses croyances et pratiques superstitieuses des Montagnais, il en est une, que l’on connaît sous le nom de « Lecture de l’omoplate, » mais c’est l’une, je crois des moins connues et des plus curieuses. Ils la pratiquent bien rarement en la présence d’un blanc, « notre frère, » à moins que celui-ci soit tenu en haute estime ou ait vécu parmi eux. Je suppose que c’est dû à ce que le secret en pourrait être dévoilé à leur préjudice. Dans le dialecte Montagnais cette coutume s’appelle outlickan meskina dont la traduction littérale serait « Pistes de l’os de l’épaule. »

Les os de divers animaux servent à cette fin, mais l’os favori, le plus fiable, le mieux pronostiquant dans leur croyance est celui du caribou. Aussitôt que l’animal est dépecé, on enlève l’os de l’épaule en le coupant à la première articulation. Avec un couteau bien aiguisé, on le dépouille à nu de toute sa chair et on le met bouillir pendant quelques minutes, juste assez pour en faire se détacher tout lambeau de chair. Alors on l’accroche dans le wigwam pour le faire sécher, et, dans la soirée, lorsque les enfants sont endormis, on déchiffre comme suit les marques de l’os :

On fend à moitié un petit morceau de bois pour y introduire la partie de la jointure de l’omoplate, et servir de manche. On expose l’os l’espace de quelques secondes à des charbons ardents. La chaleur intense fait craquer l’os de tous côtés, suivant, naturellement, le degré de chaleur auquel ou en expose les différentes surfaces. Comme cette opération ne peut se faire d’une façon uniforme, il s’ensuit que la lecture des irrégularités varie. Une longue fêlure en ligne droite d’une extrémité à l’autre signifie mort