Page:Comptes rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences, tome 001, 1835.djvu/404

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Supposons, un moment, que les vagues de l’Océan soient immobiles, pétrifiées ; que ferait-on sur un navire également stationnaire et situé dans le creux de l’une de ces vagues, s’il fallait en mesurer la hauteur réelle, s’il fallait déterminer la distance verticale de la crête et du creux ? Un observateur monterait graduellement le long du mât, et s’arrêterait à l’instant où la ligne visuelle horizontale, partant de son œil, paraîtrait tangente à la crête en question ; la hauteur verticale de l’œil, au-dessus de la surface de flottaison du navire, toujours situé, par hypothèse, dans le creux, serait la hauteur cherchée. Eh bien ! cette même opération, il faut essayer de la faire au milieu de tous les mouvemens, de tous les désordres d’une tempête.

Sur un navire en repos, tant qu’un observateur ne change pas de place, l’élévation de son œil au-dessus de la mer reste constante et est très facile à trouver. Sur un navire battu par les flots, le roulis et le tangage inclinent les mâts, tantôt d’un côté, tantôt d’un autre. La hauteur de chacun de leurs points, celle des huniers, par exemple, varie sans cesse, et l’officier qui s’y est établi ne peut connaître la valeur de sa coordonnée verticale, au moment où il observe, que par le concours d’une seconde personne, placée sur le pont, et dont la mission est de suivre les mouvemens du mât. Quand on borne sa prétention à connaître cette coordonnée, à la précision d’un tiers de mètre, par exemple, le problème nous semble complétement résolu, surtout si l’on choisit pour observer les momens où le navire se trouve à peu près dans sa position naturelle ; or, il est précisément ainsi au creux de la vague.

Reste maintenant à trouver le moyen de s’assurer que la ligne de visée aboutissant au sommet d’une crête, est horizontale.

Les crêtes de deux vagues contiguës sont à la même hauteur, au-dessus du creux intermédiaire. Une ligne visuelle horizontale, partant de l’œil de l’observateur, quand le navire est dans le creux, va, je suppose, raser la crête de la vague qui s’approche ; si l’on prolonge cette ligne du côté opposé, elle ira aussi toucher seulement à son sommet, la crête de la vague déjà passée. Cette dernière condition est nécessaire et elle suffit pour établir l’horizontalité de la première ligne de visée ; or, avec l’instrument connu sous le nom de secteur de dépression (deep sector), avec les cercles ordinaires armés d’un miroir additionnel, on peut voir en même temps, dans la même lunette, dans la même partie du champ, deux mires, situées à l’horizon, l’une en avant et l’autre en arrière. Le secteur de dépression apprendra donc à l’observateur s’élevant graduellement le long du mât, à quel ins-