Page:Comptes rendus hebdomadaires des séances de l’Académie des sciences, tome 001, 1835.djvu/565

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grand géomètre et pour son ami, son élève et son digne confrère M. Navier.

Les recherches que nous venons d’indiquer portent éminemment le cachet des travaux de Fourier, travaux où chaque découverte théorique est illustrée par des applications importantes ; tandis que chaque grande application, impraticable avant lui, devient possible par les méthodes d’analyse générale qu’il invente dans ce dessein même. C’est le double succès qu’on admire surtout dans sa théorie mathématique de la chaleur, et dans les méthodes d’intégration qui la caractérisent et la fécondent.

Les sciences exactes ont fait, dans la personne de M. Legendre, une autre perte irréparable. À 78 ans il réimprimait et perfectionnait sa théorie des nombres ; à 80 il achevait et publiait le troisième et dernier supplément de ses Fonctions elliptiques : ouvrage où des calculs immenses et des recherches aussi neuves que profondes, montrent ce qu’avait conservé de puissance intellectuelle ce vieillard illustre par son génie et vénérable pour son beau caractère. Récompensé par Napoléon pour avoir, avec Lagrange et Laplace, conservé durant le grand règne, la suprématie mathématique de la France ; dépouillé dix ans plus tard, pour avoir refusé d’inféoder son suffrage académique, audacieusement réclamé comme un tribut monarchique, et pour avoir fait entendre au pays le cri de sa conscience indignée, M. Legendre supporta sans se plaindre cette adversité glorieuse. Il se consola de sa fortune déchue par de nouveaux services rendus à la science. Enfin, après avoir tout fait pour mériter la gloire la plus pure, il mourut en défendant qu’on écrivît son éloge ; mais il n’a pu nous interdire de jeter comme un germe fécond, dans le cœur des néophytes de la science, le souvenir de sa carrière et l’exemple de ses vertus.

L’Académie reste fidèle au système qui fit admettre dans son sein, sans distinction d’origine, les Huygens et les Cassini. Elle a remplacé Legendre par un géomètre qui naquit dans la patrie de Galilée. Nos derniers volumes sont enrichis de ses recherches sur l’intégration des équations linéaires aux différences du second ordre et des ordres supérieurs. M. Libri vient de publier le premier volume de son Histoire des mathématiques en Italie ; tandis qu’il en faisait hommage à l’Institut, l’édition entière, partageant le sort de la Mécanique céleste, était dévorée par le vaste incendie que la capitale déplore. L’auteur supportait sa perte avec le calme du sage, et prenait ainsi pour lui-même la première des leçons que donnera son ouvrage. C’est un édifice qu’il érige à la philosophie des sciences, pour montrer à la