Page:Comte - Discours sur l’esprit positif.djvu/109

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leurs travaux habituels. Depuis que l’action réelle de l’Humanité sur le monde extérieur a commencé, chez les modernes, à s’organiser spontanément, elle exige la combinaison continue de deux classes distinctes très inégales en nombre, mais également indispensables : d’une part, les entrepreneurs proprement dits, toujours peu nombreux, qui, possédant les divers matériaux convenables, y compris l’argent et le crédit, dirigent l’ensemble de chaque opération, en assumant dès lors la principale responsabilité des résultats quelconques ; d’une autre part, les opérateurs directs, vivant d’un salaire périodique et formant l’immense majorité des travailleurs, qui exécutent, dans une sorte d’intention abstraite, chacun des actes élémentaires, sans se préoccuper spécialement de leur concours final. Ces derniers sont seuls immédiatement aux prises avec la nature, tandis que les premiers ont surtout affaire à la société. Par une suite nécessaire de ces diversités fondamentales, l’efficacité spéculative que nous avons reconnue inhérente à la vie industrielle pour développer involontairement l’esprit positif doit ordinairement se faire mieux sentir chez les opérateurs que parmi les entrepreneurs ; car, leurs travaux propres offrent un caractère plus simple, un but plus nettement déterminé, des résultats plus prochains, et des conditions plus impérieuses. L’école positive y devra donc trouver naturellement un accès plus facile pour son enseignement universel, et une plus vive sympathie pour sa rénovation philosophique, quand elle pourra convenablement pénétrer dans ce vaste milieu social. Elle y devra rencontrer, en même temps, des affinités morales non moins précieuses que ces harmonies mentales, d’après cette commune insouciance matérielle