Page:Conan - Elisabeth Seton, 1903.djvu/47

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
49
ÉLISABETH SETON

On lui fit visiter les jardins, les palais, les musées ; et encore qu’elle eût très vif le sentiment de toutes les beautés, rien ne la toucha. « Il m’était impossible, disait-elle, de regarder et de ne pas penser, et chaque pensée était au fond de mon âme comme un sanglot. »

La petite Anna partageait les promenades et les jeux des quatre enfants d’Antonio Filicchi. Mais cette vie charmante ne lui faisait pas oublier son père et lorsqu’elle récitait avec sa mère les prières qu’ils avaient coutume de dire ensemble au lazaret, elle pleurait toujours abondamment : « Mon cher papa loue Dieu dans le ciel et je ne devrais pas pleurer, dit-elle un soir, mais je crois que cela est bien naturel, n’est-ce pas, maman ? Je pense à cette parole de David : J’irai vers lui, s’il ne peut revenir vers moi. »

Après quelques jours passés à Florence, les luttes d’Élisabeth la ramenèrent à Livourne : “Les Filicchi font tout ce qu’ils peuvent pour adoucir ma situation ; on dirait qu’ils croient n’en pouvoir jamais assez faire, écrivait-elle à sa famille. Vraiment, depuis que nous avons quitté notre pays, nous n’avons rencontré que bonté, empressement, même de la part des étrangers et des serviteurs. Ici, à Livourne, les souffrances et la mort de mon mari ont inspiré pour nous tant d’intérêt à un grand nombre de personnes, que de tout côté c’est à qui cherche à nous consoler, à nous entourer de soins. Quand je considère ma situation si incertaine maintenant et si dépourvue de ressource au point de vue de ce monde, je ne puis m’empêcher de sourire à leur tendresse et à leur bonté. La petite Anna me dit souvent : « Maman, que d’amis Dieu avait préparés pour nous dans ce pays étranger ! car ils sont pour nous des amis, même avant de nous connaître. » Elle dit vrai ; et moi, je dis en mon cœur : quelle consolation Dieu m’a préparée, quand il m’a donné une pareille enfant ! Je préfère sa conversation à toutes celles que je puis avoir de ce côté-ci du tombeau. »