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L'OBSCURE SOUFFRANCE

Avec bonté, le Père demanda :

—  « Mon enfant, êtes-vous timide ?

—  « Non, répondis-je.

—  « Confessez-vous donc, poursuivit-il, et comme vous feriez à Jésus-Christ lui-même. Quoique vous ayez à dire, parlez sans crainte. Avec quelque chose de sa puissance, Notre Seigneur donne à ses prêtres quelque chose de son indulgence, de sa miséricorde. »

Il y avait dans sa voix une douceur, une justesse d’accent, qui me rassura, et je parlai. J’accusai mes aversions, mes ressentiments, mes mépris du prochain, les coupables tristesses, les révoltes contre la souffrance et enfin l’abominable désir de la mort de mon père.

Le religieux ne broncha pas. Je me demandai s’il avait entendu, et après un petit silence, j’allais répéter l’accusation quand il me dit avec une bonté profonde :

—  « Pauvre enfant, comme ce souvenir vous sera cruel, quand vous le verrez mourir. »

Puis, très doucement, il m’interrogea sur la vérité de mon désir, sur sa réelle portée, sur sa cause, tâchant de démêler ce qu’il y avait eu de réfléchi, de pleinement voulu.