terrogèrent ceux qui allaient mourir et, touchés de leurs réponses, crurent en Jésus-Christ.
Cependant une grande tristesse assombrissait pour les martyrs l’approche du triomphe. Félicité allait être mère ; la loi défendant de l’exécuter avant sa délivrance, elle se voyait condamnée à languir encore un peu, seule sur la terre. Son affliction était vivement partagée par les autres martyrs. Ils avaient souffert ensemble, ils voulaient arriver ensemble au ciel. Ils se mirent donc tous en prières. À peine leur prière était-elle finie, que les douleurs prirent la sainte. La violence du mal lui arrachant de temps en temps quelques cris, l’un des gardes lui dit :
« — Quoi ! tu te plains ! tu gémis ! que feras-tu donc quand tu seras livrée aux bêtes !
— C’est moi qui souffre maintenant ce que je souffre, répondit-elle, mais là, il y en aura un en moi qui souffrira pour moi, parce que je souffrirai pour Lui ».
Elle remit son enfant à une femme chrétienne et, dans sa foi, trouva la force de marcher avec les autres au martyre.
Lorsqu’ils furent à la porte de l’amphithéâtre, on voulut, selon la coutume, faire prendre aux hommes le manteau rouge des prêtres de Saturne, aux femmes les bandelettes des prêtresses de Cérès.
Les martyrs refusèrent ces livrées de l’idolâtrie. Une joie céleste illuminait leurs visages, cette joie éclatait dans leurs paroles, dans leurs gestes, dans tout leur extérieur. Perpétue qui marchait la dernière chantait.
Sur tous les degrés de l’amphithéâtre, la foule se pressait curieuse et cruelle. Saturnin, Révocat et Sature ne craignirent pas de menacer de la colère de Dieu ce peuple sanguinaire. Le peuple, irrité de leur hardiesse, demanda que les bestiarii passassent par les fouets[1]
- ↑ Pro ordine venatores disent les actes. On appelait venatores ceux qui étaient armés pour combattre les bêtes. Ils se rangeaient sur deux lignes, ayant un fouet à la main.