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PHYSIONOMIES DE SAINTS

que le monde aime, recherche, admire. Mais le sacerdoce lui inspirait un saint effroi. C’est seulement à vingt-sept ans qu’il reçut l’honneur divin de la prêtrise. Il célébra sa première messe dans son couvent de Loretto[1], le jour de la fête de saint François d’Assise, et ce jour-là les auges eurent peut-être la joie de voir un mortel les égaler dans l’humilité et dans l’amour.

Malgré sa jeunesse, le P. Solano réalisait dans sa perfection l’idéal séraphique, et sa famille religieuse le considérait déjà comme la gloire de l’Ordre. On voyait en lui l’un de ces ouvriers puissants qui étendent au loin l’incendie de la charité, le règne de l’éternelle Beauté.

Chargé de former les novices, le P. Solano ne put d’abord se livrer beaucoup à la prédication. L’apostolat était pourtant sa vraie, son unique vocation, et sa parole mit en ébullition les villes où il prêcha.

Plaisirs, affaires, on quittait tout pour entendre le P. Solano. Sa foi emportait les âmes. Son éloquence était de lumière et de feu.

Il n’avait déjà plus cette fleur de beauté et de jeunesse qui charmait autrefois tous les regards. La pénitence où il s’était jeté à corps perdu l’avait prématurément fané, vieilli. Après la mort de son père, quand il obtint d’aller consoler sa mère accablée de douleur, ses anciens serviteurs ne le reconnurent point. Mais sous les traces de la mortification surhumaine rayonnait la splendide beauté intérieure. Tout en lui commandait l’attention, le respect ; et le don des miracles que Dieu lui accorda dès lors ajouta encore au prestige de sa sainteté.

Il fit le premier à Montilla, sa ville natale, en faveur d’un enfant rongé d’horribles et incurables ulcères. On le lui avait présenté pour qu’il lût sur lui un évangile. Le P. Solano fit détacher les bandelettes qui enveloppaient le pauvre petit être… Je n’ose continuer, je n’ose dire ce que la compassion lui inspira.

  1. Ce couvent existe encore. Devant l’église, on voit douze grands cèdres plantés par le saint.