Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 1.djvu/157

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semblable à la première, que vous ne l’en convaincrez pas.

§. 87. Les impressions qui se font dans les cerveaux froids s’y conservent longtemps. Ainsi les personnes dont l’extérieur est posé & réfléchi n’ont d’autre avantage, si c’en est un, que de garder constamment les mêmes travers. Par-là, leur folie, qu’on ne soupçonnoit pas au premier abord, n’en devient que plus aisée à reconnoître pour ceux qui les observent quelque temps. Au contraire, dans les cerveaux où il y a beaucoup de feu & beaucoup d’activité, les impressions s’effacent, se renouvellent, les folies se succèdent. A l’abord, on voit bien que l’esprit d’un homme a quelque travers ; mais il en change avec tant de rapidité, qu’on peut à peine le remarquer.

§. 88. Le pouvoir de l’imagination est sans bornes. Elle diminue ou même dissipe nos peines, & peut seule donner aux plaisirs l’assaisonnement qui en fait tout le prix. Mais, quelquefois, c’est l’ennemi le plus cruel que nous ayons : elle augmente