Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 1.djvu/58

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qui se fait au théâtre en est la preuve. Il y a des momens où la conscience ne paroît pas se partager entre l’action qui se passe & le reste du spectacle. Il sembleroit d’abord que l’illusion devroit être d’autant plus vive, qu’il y auroit moins d’objets capables de distraire. Cependant chacun a pu remarquer qu’on n’est jamais plus porté à se croire le seul témoin d’une scène intéressante, que quand le spectacle est bien rempli. C’est peut-être que le nombre, la variété & la magnificence des objets remuent les sens, échauffent, élèvent l’imagination, &, par-là, nous rendent plus propres aux impressions que le poëte veut faire naître. Peut-être encore que les spectateurs se portent mutuellement, par l’exemple qu’ils se donnent, à fixer la vue sur la scène. Quoi qu’il en soit, cette opération, par laquelle notre conscience, par rapport à certaines perceptions, augmente si vivement qu’elles paroissent les seules dont nous ayons pris connoissance, je l’appelle attention. Ainsi être attentif à une