Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 2.djvu/207

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peuple souffre donc à peu près les mêmes variations que son gouvernement, & il ne se fixe point que celui-ci n’ait pris une forme constante.

§. 143. Ainsi que le gouvernement influe sur le caractère des peuples, le caractère des peuples influe sur celui des langues. Il est naturel que les hommes toujours pressés par des besoins, & agités par quelque passion, ne parlent pas des choses sans faire connoître l’intérêt qu’ils y prennent. Il faut qu’ils attachent insensiblement aux mots des idées accessoires qui marquent la manière dont ils sont affectés, & les jugemens qu’ils portent. C’est une observation facile à faire ; car il n’y a presque personne dont les discours ne décelent enfin le vrai caractère, même dans ces momens où l’on apporte le plus de précaution à se cacher. Il ne faut qu’étudier un homme quelque tems pour apprendre son langage : je dis son langage, car chacun a le sien selon ses passions : je n’excepte que les hommes