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Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 2.djvu/214

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du langage pour le siècle où ils vivent ; car les mots répondent aux signes des géométres, & la manière de les employer répond aux méthodes de calcul. On doit donc trouver dans une langue qui manque de mots, ou qui n’a pas des constructions assez commodes, les mêmes obstacles qu’on trouvoit en géométrie avant l’invention de l’algebre. Le françois a été pendant longtems si peu favorable aux progrès de l’esprit, que si l’on pouvoit se représenter Corneille successivement dans les différens âges de la monarchie, on lui trouveroit moins de génie à proportion qu’on s’éloigneroit davantage de celui où il a vécu, & l’on arriveroit enfin à un Corneille qui ne pourroit donner aucune preuve de talent.

§. 148. Peut-être m’objectera-t-on que des hommes tels que ce grand poëte, devoient trouver dans les langues savantes les secours que la langue vulgaire leur refusoit.

Je réponds qu’accoutumés à concevoir les choses de la même manière