Page:Condillac - Essai sur l’origine des connaissances humaines, Mortier, 1746, tome 2.djvu/295

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facilement les choses qu’il est de notre intérêt de connoître.

§. 49. Le défaut d’ordre plaît aussi quelquefois, mais cela dépend de certaines situations où l’ame se trouve. Dans ces momens de rêverie, où l’esprit, trop paresseux pour s’occuper long-tems des mêmes pensées, aime à les voir flotter au hasard, on se plaira, par exemple, beaucoup plus dans une campagne, que dans les plus beaux jardins. C’est que le désordre qui y régne, paroît s’accorder mieux avec celui de nos idées, et qu’il entretient notre rêverie, en nous empêchant de nous arrêter sur une même pensée. Cet état de l’ame est même assez voluptueux, surtout lorsqu’on en jouit après un long travail.

Il y a aussi des situations d’esprit favorables à la lecture des ouvrages qui n’ont point d’ordre. Quelquefois, par exemple, je lis Montaigne avec beaucoup de plaisir, d’autrefois j’avoue que je ne puis le supporter. Je ne sais si d’autres ont