Dans le premier volume de la première édition de son Histoire des Girondins, M. de Lamartine s’est occupé de Condorcet aux pages 233 et 403. La première fois, notre savant confrère est appelé ambitieux. À la page 403, l’imputation est aggravée : Condorcet n’est plus seulement un ambitieux ordinaire, il est qualifié d’ambitieux sans scrupule.
On éprouve généralement des difficultés réelles quand on se trouve dans l’obligation de repousser des accusations formulées en des termes aussi vagues. Les jésuites avaient appelé Pascal Porte d’Enfer. « Comment, disait gaiement l’auteur des Provinciales, démontrer que je ne suis pas une porte d’enfer ? » Heureusement je n’éprouverai pas, moi, dans cette circonstance, l’embarras de Pascal ; deux faits, deux faits incontestables, réduiront au néant le reproche d’ambition adressé à l’ancien secrétaire de l’Académie des sciences.
On propose à Condorcet d’être le précepteur du Dauphin ; il refuse.
On lui offre le ministère de la marine ; il refuse encore, et fait nommer Monge.
Prenez maintenant l’histoire de tous les temps et de tous les pays, et si vous y rencontrez un seul ambitieux qui n’ait point accepté avec empressement deux positions aussi élevées que la position de ministre et celle de gouverneur de l’héritier