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ENTRE VOLTAIRE ET CONDORCET.


que M. Bitaubé m’a apporté. Vous pouvez l’envoyer par la poste à M. Turgot. C’est le plus beau sujet de prix qu’aucune académie ait proposé.

Les petits enfants de madame la duchesse d’Enville partiront vers la fin de février pour Genève ; quoique très-fâchés de quitter la maison paternelle, l’espérance de vous voir les a presque consolés. Je vous écrirai par eux sur quelques objets que je ne me soucie de communiquer ni à la canaille qui ouvre les lettres à la poste, ni à celle qui s’est opposée à l’abolissement de cette violation de toutes les lois de l’équité et de la décence. Si les méchants voulaient bien s’abstenir seulement des infamies qui ne leur sont bonnes à rien, le genre humain serait délivré de la moitié de ses maux. Adieu, mon cher et illustre maître, vous connaissez mon respect et ma tendre amitié.

Je viens d’apprendre par M. d’Argental [1] que vous voulez que Nicéphore ne soit pas trop odieux ; il me paraît que vous ne pouvez guère disculper Alexis qu’en faisant de Nicéphore un tyran, et un tyran qui a formé le projet de faire périr sa femme, projet dont l’arrivée d’Alexis puisse seule empêcher l’exécution. Le respect d’Irène pour son mari coupable en

  1. Voltaire écrivait à d’Argental, le 14 janvier 1778 :

    « Vous sentez combien il est difficile de nuancer tellement les choses, qu’Alexis soit intéressant en étant pourtant un peu coupable, et que Nicéphore ne fut point odieux, afin qu’ils servent l’un et l’autre à augmenter la pitié que l’on doit avoir pour Irène. » C’est évidemment à ce passage que se rapporte celui de Condorcet.