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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 1.djvu/537

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CORRESPONDANCE GÉNÉRALE.


des du peuple par une conduite moitié audacieuse, moitié perfide et surtout inconséquente. Il fallait pour cela qu’il se formât dans l’Assemblée une majorité constante ; et la cour, à force de libelles et de corruption, l’empêchait constamment de se former ; elle n’était occupée que d’avilir l’Assemblée nationale et de répandre que les patriotes n’y étaient qu’une petite fraction. Qu’en est-il résulté ? L’opinion générale que l’Assemblée ne pouvait pas sauver la chose publique dans l’extrême danger, frappait tous les yeux, et le peuple a voulu se sauver lui-même. La modération du peuple dans la journée du 20 juin, et, ce qui est bien plus caractéristique encore, le ruban placé sur la terrasse des Tuileries pour séparer le terrain de l’Assemblée nationale de celui du roi, et que personne n’osait passer, tout annonçait que le mécontentement général prenait ce caractère calme et réfléchi qui le rend terrible pour les tyrans. En même temps, l’Assemblée ne portant que des coups timides, même à des ministres méprisés qui se succédaient de semaine en semaine, s’enveloppant dans les subtilités constitutionnelles, semblait dire au peuple : Je ne puis rien, venez à mon secours. Ainsi cette conduite, qui était l’ouvrage des partisans de la cour, aurait été une combinaison très-adroite pour amener les événements du 10 août, si elle avait été inspirée par le parti contraire. Mais le parti de la liberté n’avait ni la volonté ni les moyens de suivre une telle politique : il agissait au jour le jour, suivant l’impulsion de ses lumières et de sa science, et attendait les événements, puisque la faiblesse du reste