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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 1.djvu/835

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DE M. DE CONDORCET.


des importuns, et il est accessible à tout le monde. Jamais sa porte n’est fermée, parce que son premier besoin est d’être utile aux gens qui viennent le consulter. Il a renoncé à la vie des gens du monde ; il a fait plus encore, car il a sacrifié à son travail la société des gens de lettres qui le chérissent le plus, et avec qui il se plaît de préférence. On dirait qu’après un tel renoncement à ses goûts, il doit être contrarié quand quelques circonstances changent l’arrangement de sa vie ? il ne paraît pas seulement s’en apercevoir. S’il agit pour rendre service à quelqu’un ou pour faire plaisir à son ami, il ne voit plus que cela, et il retrouve dans cet intérêt de quoi le dédommager du sacrifice qu’il fait. Jamais on n’a été moins personnel, moins occupé de soi, plus prêt à abandonner son plaisir et ses goûts. Il ne tient fortement qu’à ses affections, il y sacrifierait tout, et, pour les satisfaire, il s’est affranchi de ce qu’on appelle si improprement devoirs de société. Il ne fait point de visites, il vit avec ses amis, et il va voiries gens qu’il peut servir ou ceux à qui il a affaire. Il aimait les spectacles, il n’y va point parce que cela prendrait sur les heures qu’il a consacrées à l’amitié, c’est-à-dire, au premier besoin de son âme. Quoiqu’il soit peu caressant et peu affectueux, cependant si par quelques circonstances il a été séparé des gens qu’il aime, il a besoin en les revoyant de leur donner une marque de tendresse ; il embrasse son ami non parce que c’est l’usage, mais parce que son cœur a besoin de se rapprocher de lui.

Cette âme calme et modérée dans le cours ordi-