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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 1.djvu/96

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LXXXII
BIOGRAPHIE


les Provinciales avaient fait une éclatante justice.

Lorsque, dans son ardente guerre contre le sentiment que l’homme nourrit de sa grandeur, Pascal insinue que nos actions les plus belles sont toujours obscurcies par des pensées d’amour-propre, par l’espérance de la publicité et des applaudissements qu’elle amène à sa suite, je lis avec délices, dans une note du commentateur, cette anecdote touchante empruntée à nos annales maritimes, et qui dément la triste réflexion de Pascal :

« Le vaisseau que montait le chevalier de Lordat était prêt à couler à fond à la vue des côtes de France. Le chevalier ne savait pas nager ; un soldat, excellent nageur, lui dit de se jeter avec lui dans la mer, de le tenir par la jambe, et qu’il espère le sauver par ce moyen. Après avoir longtemps nagé, les forces du soldat s’épuisent. M. de Lordat s’en aperçoit, l’encourage ; mais enfin le soldat lui déclare qu’ils vont périr tous deux. — Et si tu étais seul. ? — Peut-être pourrais-je encore me sauver. Le chevalier de Lordat lâche la jambe et tombe au fond de la mer. »