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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 10.djvu/199

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de la liberté, etc.

fecler l’amour de la liberté, celui de IVgalilé, de cacher sous ce voile tous les projets de l’ambition ou de l’orgueil, ou de faire des hommes à qui ces dehors en imposent les aveugles instruments des desseins les plus coupables.

Mais lorsqu’il existe des moyens légaux d’obtenir la réforme des mauvaises lois, le respect pour la loi établie ne peut, même quand il serait porté jusqu’au scrupule, ni menacer la liberté, ni retarder les réformes nécessaires ; au contraire, en les rendant plus paisibles, il les rend plus certaines, il assure qu’elles seront mieux faites. Un peuple en qui ce sentiment domine oppose à l’ambition, à l’intrigue, une digue qu’elles ne peuvent rompre tant qu’il ne s’affaiblira pas. À chaque pas que voudront faire les ennemis de l’ordre et de la paix, ils se trouvent arrêtés, parce qu’attendre et procurer par les moyens légaux la révocation d’une loi injuste, est alors l’unique vœu des citoyens, en qui ils seront parvenus à exciter un mécontentement bien ou mal fondé. L’ambitieux qui oserait leur proposer d’autres mesures, flétri du nom d’ennemi de la paix et de la loi, ne pourrait plus se faire écouter.

Le peuple voit alors ses ennemis dans les ennemis de la loi, et n’est plus exposé à confondre ses véritables amis et ses ennemis déguisés ; il n’a pas besoin d’être éclairé pour éviter les pièges qu’ils lui tendent, et il a, pour juger du point où on veut le conduire, une règle à la portée de tous les esprits.