Aller au contenu

Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 11.djvu/20

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

au commerce de blé… Ah ! Monsieur, ce sont les plus habiles gens du monde pour remédier aux disettes qu’ils ont fait naître.

La permission de ne faire sortir que des farines, aura l’avantage immense de conserver en France plus de son, sans compter celui de donner aux propriétaires de moulins le privilège exclusif du commerce étranger, et d’introduire une exportation de grains, qui ne sera pas un encouragement pour l’agriculture.

Enfin, Monsieur, je ne vois rien dans tout cela qui tende à soulager le peuple. Vous proposez de ne faire cette loi que pour dix ans, je trouve que c’est beaucoup trop encore : mais laissez-nous d’abord essayer de la liberté aussi pendant dix ans.

Oh ! cela est fort différent, direz-vous, parce que le peuple est une espèce d’animal très-patient, mais qui au moindre bruit de cherté devient furieux : le seul mot de prohibition, de loi contre les marchands de blé, lui rend la raison et le calme. Voilà le véritable fondement des lois prohibitives : car, après tout, on doit respecter la faiblesse de ce pauvre peuple, qui est disposé à tout souffrir, pourvu qu’on songe à lui donner du pain. S’il n’avait pas de préjugé contre la liberté, ce système en vaudrait bien un autre : mais les préjugés du peuple sur cet objet sont absolument incurables. N’est-ce pas à peu près, Monsieur, ce que vous avez voulu dire, dans ce que j’ai pu entendre de votre livre, sur les motifs des lois prohibitives ?

Le peuple est stupide, sans doute ; mais ce n’est