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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 12.djvu/571

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de leurs représentants.

la justice, si la soumission à la loi, si le zèle pour l’ordre public, faisaient également partie de cet esprit général. Mais le sentiment de la justice, quoique naturel à l’homme, s’affaiblit et se déprave dans ceux qui ont gémi sous le despotisme. Mais les Français, longtemps accoutumés à n’obéir qu’à des hommes, n’ont pu prendre en si peu de temps l’heureuse habitude de ne voir que la loi dans celui qui commande en son nom. Mais le zèle pour l’ordre public est faible dans ceux qui n’ont pas encore joui des bienfaits de l’union, de l’ordre et de la liberté, qui n’ont jamais vu régner la paix qu’à côté de l’esclavage.

L’exemple de la Convention fortifierait à cet égard l’esprit général, sans risquer d’affaiblir les élans du patriotisme.

Que, dans ses discussions, elle écoute avec patience même les fausses subtilités qui se couvrent du nom sacré de la justice. Qu’elle ne croie plus qu’il y ait à les mépriser, de l’élévation d’esprit ou de l’habileté politique. Qu’elle n’avilisse plus le mot révolutionnaire, en paraissant le faire servir de voile à ce que l’exacte équité aurait désavoué.

Que, sévère à l’égard des fonctionnaires publics, elle montre à ceux même qui leur auront résisté avec de bonnes intentions et avec justice, le point où ils se sont écartés de la soumission due à la loi. Que jamais elle ne se laisse soupçonner de pouvoir partager cette opinion absurde, qu’il existe entre l’ordre et la liberté une incompatibilité réelle ; qu’elle cherche, au contraire, à détruire ce préjugé si funeste à la