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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/180

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ÉLOGE DE M. LA CONDAMINE.


passer les vacances dans une maison, où l’on disait qu’on voyait des revenants dans un endroit du parc ; il propose à deux domestiques de l’y conduire : à peine y est-il arrivé, qu’à un coup de sifflet les guides s’enfuient avec terreur, et qu’un fantôme vêtu de blanc s’avance vers lui. M. de la Condamine avait caché son épée sous son habit ; il marche au revenant, le frappe, l’épée se brise. Le fantôme est un corps, s’écrie-t-il en riant ; il a cassé mon épée. Un cocher s’était ainsi déguisé pour éprouver jusqu’où irait le courage du jeune écolier. De pareilles épreuves, tentées sur des enfants d’une imagination vive et d’un caractère timide, ont eu quelquefois des suites funestes.

En revenant du siège de Roses, M. de la Condamine avait encore la plus grande innocence de mœurs, malgré les efforts de ses camarades de collège et de garnison. Il devait une partie de cette innocence aux ravages de la petite vérole : le changement qu’elle avait fait sur sa figure le frappa tellement, qu’il n’osait se flatter de plaire ; et il avait encore le bonheur d’ignorer qu’on pût se passer d’être aimé. C’est peut-être à cette circonstance de sa vie qu’il dut la force de sa constitution. Les jeunes gens ne savent pas assez tout ce qu’un peu de modération leur peut assurer, pour la vie entière, d’avantage et même de plaisir.

Voilà où se terminent l’histoire privée de M. de la Condamine et le manuscrit de ses mémoires ; le reste de sa vie appartient à l’histoire des sciences.

Le système de Law avait considérablement dimi-