avait montrée à son arrivée ne se démentit pas. La
franchise et la noblesse de son caractère lui avaient fait des amis : il employa souvent leur crédit d’une manière utile pour ses confrères ; et il quitta le Pérou,
après avoir emprunté, en son nom, plus de quarante
mille écus, pour les dépenses communes. Ce fut dans
ce voyage qu’il contracta cette surdité qui n’a fait
qu’augmenter le reste de sa vie. Privé presque absolument
d’un des deux sens qui lui servaient à satisfaire
sa curiosité, il semblait que cette passion, réduite
à un seul sens, n’en était devenue que plus
active et plus indiscrète. Son tempérament avait résisté
à tant de fatigues incroyables ! mais il rapporta
du Pérou le germe de cette paralysie singulière qui
l’a condamné, dans les dernières années de sa vie,
à une inaction si pénible pour lui.
Le grand vicaire de Cuença regardait les Français comme des hérétiques ; mais l’opinion générale du peuple voulait qu’ils fussent sorciers ; les gens plus éclairés les croyaient envoyés pour chercher des mines d’or dans les Cordillères. Dans un des voyages qu’ils firent sur ces montagnes, tantôt pour essayer de parvenir jusqu’à la bouche d’un volcan, tantôt pour faire des observations sur la longueur du pendule, un moine franciscain révéla à M. de la Condamine le secret d’une mine d’or qui y était cachée : il se proposait de faire, de cette découverte, un usage bien utile aux malheureux Indiens ; et il le croyait, sans doute, bien propre à intéresser M. de la Condamine à la recherche de ces mines. Le projet du bon père était d’en consacrer le produit à l’établissement