entendre au public les avantages de cette méthode.
Cependant l’inoculation se pratiquait en Angleterre,
presque sans contradiction : la Hollande, Genève l’avaient adoptée, et la pratique en était encore inconnue en France, lorsque M. de la Condamine s’en déclara l’apôtre. Il avait été témoin, en Amérique, des
succès de l’inoculation : un missionnaire qui la connaissait, l’avait employée dans une épidémie, et il
avait sauvé la peuplade qu’il dirigeait d’une destruction
totale ; car la chaleur du climat, et peut-être
la dureté de la peau des sauvages, toujours exposée
à l’air et enduite de vernis, rendent mortel, dans
l’Amérique, ce funeste présent que les Européens lui
ont fait, et dont elle s’est si cruellement vengée. Bien
convaincu de l’utilité d’une méthode si importante,
M. de la Condamine regarda comme un devoir d’employer
toutes ses forces pour la soutenir et la répandre.
Ce n’est point aux savants qu’il s’adressa
dans ses ouvrages : ou les savants n’ont point de préjugés, ou rien ne les peut détruire. C’est pour les
gens du monde, pour les mères tendres, et dont le
courage avait besoin d’un appui, qu’il écrivit ses
mémoires sur l’inoculation. Il les écrivit avec agrément,
pour qu’ils fussent lus ; et il y mit moins de
raisonnement que d’expérience. Il cherchait à rassembler
des faits avec une activité infatigable. Les ennemis
de l’inoculation avaient trouvé plus commode
d’en inventer de faux : il fallait les détruire ; et ce
n’est pas ce qui a le moins coûté à M. de la Condamine,
ni peut-être ce qui a le moins servi à sa cause.
Son premier mémoire est de l’année 1754 ; et c’est en
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ÉLOGE DE M. DE LA CONDAMINE.