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Page:Condorcet - Œuvres, Didot, 1847, volume 2.djvu/248

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ÉLOGE DE M. TRUDAINE.


soins, se faisait encore par des ponts de bois. MM. Trudaine croyaient que la véritable splendeur du trône n’est que dans les monuments utiles aux peuples.

Dans cette partie de l’administration, les connaissances de M. Trudaine le défendaient encore contre des erreurs d’autant plus difficiles à éviter, que la voix publique est presque toujours en ces occasions complice des fautes de l’administrateur. Il ne suffit pas que les ouvrages consacrés à l’utilité publique remplissent le but qu’on s’est proposé ; il ne suffit pas que les difficultés qui s’opposaient à la construction de ces ouvrages aient été heureusement surmontées : si, comme il n’est arrivé que trop souvent, des vues particulières ont empêché de donner à ces travaux une utilité plus grande. ; si l’idée d’une magnificence déplacée en a augmenté la dépense ; si la vanité a rassemblé des obstacles pour avoir l’honneur de les vaincre ; alors, tandis que le vulgaire est frappé du mérite de la difficulté vaincue, tandis qu’il admire le spectacle imposant d’une construction hardie, d’un immense travail, d’une dépense énorme, l’homme éclairé ne voit qu’une charlatanerie méprisable, plaint le peuple immolé à la vanité d’un artiste, et gémit de l’ignorance de l’homme en place.

M. Trudaine savait qu’un ouvrage public n’est digne d’estime que lorsqu’il réunit tous les avantages dont il est susceptible, et n’est grand que lorsqu’il étonne par la comparaison de ce qu’il est avec ce qu’il a coûté ; enfin, qu’il n’annonce le vrai génie