avait tant aimé, le seul héritier de son nom qui
suivît la profession de ses pères, le seul objet par
qui M. de Bourdelin tenait encore à la vie. Cette
perte mit le comble à tous les malheurs qu’il avait
éprouvés, et les facultés de son âme s’en ressentirent.
Cet homme d’un esprit si sage, d’une raison si
saine, d’une mémoire si immense, d’une érudition
si étendue et si exacte, éprouva le dépérissement
d’esprit et de corps qu’entraîne le chagrin joint à la
vieillesse. Une mélancolie profonde, fruit de la douleur
de ses pertes et du sentiment de sa décadence,
s’empara de lui : il traînait et supportait avec peine
des jours qu’il ne pouvait plus rendre utiles aux autres.
Nous l’avons vu souvent venir chercher dans
nos assemblées des distractions aux sentiments qui
l'accablaient, continuer par habitude une assiduité
qu’il avait toujours regardée comme un devoir (et il
n’en négligeait aucun), s’intéresser à nos travaux
lorsque son état lui permettait de s’en instruire, et
jouir encore avec quelque plaisir du respect que
nous inspirait le souvenir de ses travaux et de ses
vertus.
M. de Bourdelin était né avec une constitution faible, que l’étude avait dû affaiblir encore. Le calme de son âme, qui n’aimait que ce qu’elle devait aimer, n’était troublé que par des sentiments vertueux ; et sa modération dans le travail, comme dans les délassements du travail, dans son régime comme dans ses opinions ; son indifférence enfin pour la gloire et pour la fortune, lui assurèrent une longue carrière.