d’un solitaire ; tel fut M. Lieutaud : revenu de la première surprise qu’un changement inattendu lui
avait causée, il aperçut bientôt que la cour d’un
grand monarque est un des endroits où un homme
livré à l’étude peut vivre le plus isolé
et le plus libre : les courtisans ne quitteront point les affaires qui les occupent pour troubler le loisir d’un physicien.
Dans les gouvernements absolus, où les mœurs sont
féroces, c’est surtout sous les yeux du despote, et
autour de son palais, que s’exerce un pouvoir sans
bornes, que rien n’arrête, et auquel rien ne peut
soustraire : au contraire, dans les gouvernements où
les mœurs sont douces (si l’on en excepte les sacrifices
qu’exigent les passions favorites du prince),
c’est loin de la cour que le joug s’appesantit, c’est
sur le citoyen faible et sans appui, dont l’éloignement
ne laisse point entendre les cris : mais l’homme
qui ne veut qu’exister seul et libre a toujours, lorsqu’il est auprès du prince, assez de crédit pour se
défendre de l’oppression.
M. Lieutaud donnait à l’étude tout le temps que ses devoirs lui laissaient ; il cultiva les sciences dans son nouveau séjour, comme il les avait cultivées dans sa patrie ; il demeurait à Versailles, mais il ne vivait pas à la cour.
Pendant son séjour à Aix, M. Lieutaud avait envoyé à l’Académie plusieurs observations anatomiques ; il avait choisi, parmi les faits que ses nombreuses dissections lui offraient, ceux dont le résultat pouvait intéresser les physiciens et les philosophes, en même temps que les médecins. Telle est l'obser-